Détection et mesure d’économies d’énergie : 3 méthodes efficaces qui s’offrent à vous

Jenny Dujeux
Date15 novembre 2018

À l’origine de 23% des émissions de CO2 en France, le bâtiment est aujourd’hui le secteur le plus énergivore. À lui seul, il constitue un gisement important de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Le Gouvernement a d’ailleurs mis en place plusieurs réglementations comme l’audit énergétique réglementaire, le bilan carbone et le décret tertiaire. Quand peut-on réellement parler d’économies d’énergie et comment les mesure-t-on ? Définition et présentation de 3 méthodes de calcul utilisées pour évaluer les gains réalisés dans le cadre d’une démarche de performance énergétique.

Qu’est-ce qu’une économie d’énergie ?

La notion d’économie d’énergie désigne une diminution constatée de la consommation énergétique d’un bâtiment. Si l’énergie est mesurée en kilowattheure (kWh), une économie d’énergie est le plus souvent exprimée sur une base annuelle, soit en kWh/an, soit en €/an.

Pour calculer les économies d’énergie, on utilise le protocole IPMVP (International Performance Measurement and Verification Protocol) développé au niveau international par EVO et reconnu en France par l’ADEME. Selon ce protocole, une économie d’énergie correspond à la différence entre la consommation de référence ajustée et la consommation mesurée.

Dans le graphique ci-dessous, on peut visualiser l’économie d’énergie réalisée après une action de performance énergétique (APE). Les 4 variables agissant sur la consommation énergétique d’un bâtiment doivent être prises en compte dans les calculs (type d’énergie, niveau d’isolation, qualité des équipements et usage par les utilisateurs).

Trois méthodes pour mesurer des économies d'énergie

3 méthodes efficaces utilisées pour détecter et calculer les économies d’énergie

Dans toute démarche d’amélioration énergétique, il est nécessaire de pouvoir mesurer les gains de performance réalisés. Selon les données disponibles en entrée, différentes méthodes de calcul peuvent être utilisées, toutes référencées par le protocole IPMVP.

Outre les informations liées à l’activité et au patrimoine immobilier, on choisira la méthode à appliquer en fonction de la disponibilité de 3 types de données :

  • les factures d’énergie provenant des fournisseurs ;
  • les données de télérelève enregistrées par les gestionnaires de distribution d’énergie et prestataires ;
  • les renseignements fournis sur les équipements, notamment par les systèmes de gestion de la maintenance assistée par ordinateur (GMAO).

*Dans le cadre des méthodes 1 et 2, on applique des coefficients de prudence ou coefficients de correction pour compenser les erreurs de projections.

Méthode 1 : lorsqu’on possède très peu de données…

Quand on ne dispose que des factures (données les plus faciles à obtenir), on commence par faire des hypothèses sur le type d’équipement pouvant présenter des anomalies. Il s’agit ici de déterminer les coefficients de performance anormaux (par exemple une consommation surfacique élevée) puis de comparer le site considéré avec des sites similaires au regard de cet indicateur. On utilise également des méthodes statistiques descriptives et de clustering pour comparer les KPI : le gain réalisé correspondra à la différence entre le KPI actuel et le KPI théorique après résolution du problème et application des préconisations (par exemple l’extinction d’un chauffage la nuit, etc.).

Si l’on détient des données relatives aux équipements, la démarche consiste à chercher l’équipement problématique grâce aux KPI afin de pouvoir émettre des hypothèses sur le fonctionnement actuel par rapport à un fonctionnement normal. C’est la différence entre ces deux hypothèses qui permet de calculer le gain obtenu.

Méthode 2 : l’approche d’apprentissage sur les courbes de télérelève

mesurer des économies d'énergie sur une courbe de télérelève

En l’absence d’informations sur les équipements, l’approche d’apprentissage sur les courbes de télérelève dans le secteur concerné permet d’identifier une anomalie sur l’amplitude de consommation journalière ou sur le talon de consommation nocturne. Après identification de l’anomalie, on échafaude un scénario de comportement normal : c’est l’aire comprise entre la courbe existante et la courbe théorique recalculée qui indique l’énergie économisée.

Avec la liste des équipements, il est facile de déterminer une défaillance en étudiant l’écart entre la puissance atteinte sur la télérelève et la puissance calculée à partir du fichier d’inventaire des équipements. On peut ainsi déterminer des hypothèses de dysfonctionnements… et les corriger.

Méthode 3 : le recours à un algorithme prédictif

Quand on possède des données issues de la télérelève et des informations sur les équipements, on peut utiliser un algorithme prédictif capable de détecter des anomalies types sur ce type d’équipement. Cette méthode permet de mettre en place un apprentissage à grande échelle (machine learning) sur l’ensemble des points de comptage d’un client ou d’un secteur, et de déterminer des allures de courbes spécifiques. À partir des habitudes de consommation fournies par le client, on peut établir une carte d’identité de chaque modèle (pattern) et les regrouper en clusters pour les analyser.

Dans ce cas, il est encore nécessaire d’émettre des hypothèses sur l’équipement concerné afin de mettre en place un plan d’action opérationnel. Les gains réalisés correspondent à la somme des écarts entre l’allure observée et l’allure caractéristique de ce type de site.

Quelle que soit la méthode IPMVP utilisée, il faut garder en tête que le gain énergétique calculé est plus ou moins précis selon les données d’entrée fournies. Quand on a peu de données, il est nécessaire d’utiliser des coefficients de prudence pour éviter de présenter un gain trop éloigné de la réalité. Une économie d’énergie doit être considérée comme une donnée ponctuelle destinée à améliorer la performance énergétique de l’entreprise. Son calcul permet d’avoir une vision du budget à long terme et d’évaluer un retour sur investissement. Si le gain énergétique est modifiable en fonction du type de données d’entrée recueillies, il est déconseillé de le réévaluer après élaboration des hypothèses dans la mesure où certains facteurs ont pu changer entre-temps (occupation du bâtiment, climat, type d’équipement préconisé en remplacement…).